Lever la confusion terminologique liée au terme i’tikêf[1]

Aboû Fahîma ‘Abd Ar-Rahmên Ayad

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Il importe ici de souligner la confusion prévalant en français sur le terme d’el i’tikêf. En effet, après avoir expertisé les différentes équivalences périphrastiques, proportionnellement en usage, renvoyant à ce terme i’tikêf, il nous est nettement apparu qu’elles manquent, toutes, d’exactitude lexicale. De manière générale, deux traductions dominent la référence en français à ce terme, à savoir: la retraite spirituelle, et la retraite rituelle, avec aussi, une troisième traduction, mais à une faible fréquence qui est la retraite pieuse.

Très brièvement, la première équivalence, la retraite spirituelle, puise son essence de la religion catholique, où elle désigne le fait de se retirer, dans un monastère, de ses activités professionnelles, sociales, etc., dans le but de s’adonner à des méditations, à des prières, à des spiritualités… Ce qui gène en plus est le qualificatif spirituel qui réduit l’i’tikêf à un simple exercice abstrait dépourvu de la notion d’attachement à son Adoré: Allâh, non seulement spirituellement mais physiquement, aussi, par le jeûne, la salât (prière), la lecture du Qour’ên, le dhikr (rappels), etc.

Quant au deuxième terme: retraite rituelle, celui-ci étant également calqué sur l’usage chrétien de certaines prescriptions et règles organisant la vie religieuse des chrétiens, il fournit, toutefois, en islam, un sens très ambigu et assez confus; qu’est-ce qu’un rite ou un rituel en islam? Ce qui naturellement ne clarifie pas du tout le sens islamique que recouvre le terme i’tikêf. De ce fait, et afin de débroussailler ce problème, un recours à la langue source, l’arabe, dans sa dimension religieuse, s’avère indispensable.

Pour ce faire, deux ouvrages en usage fourniront notre matière terminologique, le premier étant Kitêb At-Ta’rîfêt (Le livre des définitions), d’El Djourdjênî, p. 87, dans lequel le terme i’tikêf est défini ainsi : “Linguistiquement, c’est de se situer et de se sédentariser; et religieusement, c’est le fait qu’un jeûneur, ayant conçu l’intention [de l’i’tikêf], reste dans une mosquée où l’on accomplit la prière du vendredi”.

Tandis que le second, c’est le livre intitulé Moufradêt Elfâdh El Qour’ên (Le lexique terminologique du Qour’ên), d’El Asfahênî, p. 436, où il dit : ” [linguistiquement] ‘akafa dérive de ‘oukoûf qui signifie le fait de se livrer à une chose et de s’y appliquer de façon à la vénérer, et religieusement, el i’tikêf est le fait de rester dans la mosquée dans le but de se rapprocher d’Allâh.” Enfin, partant de ces significations, la traduction (la retraite cultuelle) pour laquelle nous avons opté, par le biais de la périphrase, montre clairement la présence des deux champs, linguistique et religieux, du terme i’tikêf. Autrement dit, le fait de se retirer pour se consacrer au culte, c’est-à-dire à l’adoration d’Allâh Tout-Puissant. Et Allâh en est plus Haut et plus Savant.

Publié sur : https://scienceetpratique.com/12477-2/

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[1] Notule tirée de ma traduction La retraite cultuelle, de l’Imam El Elbênî, disponible sur : https://scienceetpratique.com/el-itikef-la-retraite-cultuelle/