De l’impossibilité d’appliquer la linguistique moderne à l’analyse du Texte coranique dans l’absolu
Remarques :
- Ce billet est un écrit de vulgarisation scientifique ou ce qu’on appelle une prépublication. C’est pourquoi je me permettais d’utiliser certains modalisateurs et expressions, pas bien aimées par les scientifiques, puisqu’ils sont le plus souvent bannis des textes scientifiques.
- Ne pas confondre le sujet de cet article avec ce que je fais dans mes recherches, car, celles-ci, je les applique sur des traductions et en français : paroles humaines, et non sur le Texte coranique arabe.
- Une version PDF est disponible sur mon site:
Partie 2 :
Au Nom d’Allâh ; et Louange à Allâh,
J’avais évoqué la fois passée dans la partie 1 (préambule) l’impossibilité de soumettre le Texte coranique (en arabe) aux postulats et méthodes d’analyse de la linguistique moderne. J’ai également mentionné que de telles études sont à priori nulles, voire elles sont dangereuses, car elles amènent à explorer et parler de la Parole d’Allâh en employant des outils d’analyse linguistiques et scientifiques qui ne sont en aucun cas développés pour analyser étudier les textes célestes ou de Révélation.
Les théories linguistiques ainsi que tout leur arsenal d’analyse et de dissection méthodologique et empirique n’ont en effet été fondés que pour l’étude des langue humaines. Cette réalité a été réitérée à plusieurs reprises par Saussure ; lui qui est le père et fondateur de la linguistique moderne, et qui d’ailleurs, et à vrai dire, ne croit en rien à quelque chose qu’on nomme Révélation ou langue et discours divin. Il faudra alors tenir compte de ce fait, puisqu’il constitue la base de mon propos. Et ainsi tous les arguments et détails sur lesquels je me fonde, tirent en fait de cette base.
Cela étant, on est alors en droit de s’interroger : comment cela se ferait-il qu’une science empirique, la linguistique, fondée pour l’étude des langues humaines ou naturelles (et précisément les langues occidentales, notamment au début) puisse explorer une langue ou un langage divin, le Qour’ên ?! Sachant de plus que la recherche linguistique n’est toujours pas close et ne le sera jamais, tant que le phénomène de l’évolution linguistique existe.
Par ailleurs, une autre question non moins importante se pose : Est-ce que la langue du Qour’ên (loughèt el Qour’ên, tel que l’appellent les savants en arabe), est-elle évolutive à l’instar des langues humaines ? (Bien sûr que non !).
Alors, comment est-ce que la science linguistique pourrait-elle se charger de l’étude du Qour’ên alors qu’elle définit la langue comme étant « un système de signes harmonieux », et qu’ « elle est un produit social » (et la langue coranique est-elle aussi un produit social ?! Absolument pas), et que ces signes « sont constitués d’un signifiant et d’un signifié », et que « la relation entre le signifiant et le signifié est arbitraire », autrement, comme l’explique Saussure, « il n’y a pas de lien logique ou rationnel entre le signifiant et le signifié ».
De ce fait, le langage coranique présente-t-il toutes ces caractéristiques propres aux langues humaines ? La réponse est également non ! Bien évidemment. Pourrait-on également décrire le Qour’ên de rationalité ou de logique ?! N’en plaise à Allâh ! Bien au contraire, les savants musulmans ont beaucoup insisté sur le fait que les mots du Qour’ên sont tous voulus et choisis volontairement par Allâh, que ce soit leurs formes, leurs sens ou leurs occurrences, c’est-à-dire leur positionnement dans chaque environnement phrastique ou énonciatif.
De plus, il y a aussi une chose importante. C’est est qu’en fait Saussure a parlé de l’arbitrarité du signe linguistique, parce qu’il l’a justement liée avec sa conception à lui de la langue, que « c’est un produit social ». C’est-à-dire que l’arbitraire du signe, donc des mots, passe par un contrat social, une convention, que les locuteurs n’ont aucune possibilité de modifier sur l’axe synchronique.
Au fait, Saussure pensait, tel qu’il l’a écrit dans son CLG, que la langue est acquise à travers la nature, que les premiers hommes ne parlaient pas mais pouvaient seulement émettre des sons, de crier dans la Nature… ! Il en avait la conviction, car : premièrement il ne croit pas à l’innéité de la langue, qu’elle est un don accordé par Allâh à notre Père Adam alors qu’il fut au Paradis, au Ciel. ((Et Il apprit à Adam tous les noms (de toutes choses), puis Il les présenta aux Anges et dit : « Informez-Moi des noms de ceux-là, si vous êtes véridiques ! » (dans votre prétention que vous êtes plus méritants qu’Adam))) La Vache, v. 31; ((1.Le Tout Miséricordieux.2 Il a enseigné le Coran.3 Il a créé l’homme.4 Il lui a appris à s’exprimer clairement.) Le Tout-Miséricordieux, v. 1-4. Trads. Hamidullah 2000. Et, deuxièmement, parce Saussure était influencé par la théorie de Darwin sur la sélection et l’évolution des espèces naturelles. Il l’a ainsi plus ou moins appliquée dans sa théorie linguistique.
Ainsi, tous ces concepts, ainsi que plusieurs autres, sont pris par Saussure tels des postulats de base. Il les a expliqués et défendus dans son livre posthume, unique et orphelin Cours de linguistique générale. Il a voulu assoir la linguistique moderne dans ce paradigme ; et il a obtenu ce qu’il voulait, puisque tous les linguistes qui lui ont emboité le pas ont fait de même, tout en développant le champ de la recherche linguistique, et surtout depuis les années 50 du siècle dernier avec l’avènement des sciences du langage.
Or, curieusement, on trouve à cette époque reculée des linguistes arabes spécialistes en linguistique moderne, qui aiment à appliquer son paradigme de recherche à la langue du Coran ! Ils utilisent les mêmes concepts (avec les deux types évoqués dans le préambule), les théories postsaussuriennes, leurs outils d’analyse, etc., qui sont tous, une fois de plus, développés pour l’étude du langage humain, laquelle étude a connu certes des progrès inouïs, et que personne ne peut nier. Mais s’en servir pour explorer le Coran que ((le faux ne l’atteint [d’aucune part], ni par devant ni par derrière : c’est une révélation émanant d’un Sage, Digne de louange)), (Les versets détaillés, v. 42. Trad Hamidullah 2000), est décidément une chose extrêmement dangereuse.
Je m’arrête ici pour cette deuxième partie. Je vais dans les parties à venir (et j’espère qu’elles ne seront pas nombreuses) donner des exemples empiriques sur l’infaisabilité de ces recherches et démontrer leur dangerosité pour la Parole divine. Car, au bout du chemin, on ne peut autrement que se retrouver face à de la falsification du Qour’ên. Puisse Allâh nous en préserver ! Cette dernière étant classée par les érudits musulmans sous deux classes : une falsification de la forme ; et une falsification du fond ou du sens.
Enfin, Louange à Allâh, et qu’Allâh prie et salue notre Prophète Mouhammed.
Dr Abderrahmane Ayad
MCA en sciences du langage
Jijel, ville du bien : le 13 Ramadan, mois béni, 1446/ Corr. au : 13/03/2025 G.
Le texte original source en arabe
في استحالة تطبيق اللسانيات الغربية لتحليل النص القرآني بإطلاق
الحلقة (2)
بسم الله والحمد لله، أما بعد: فعطفا على التوطئة السابقة التي استفتحت بها موضوع تطبيق منهج اللسانيات الغربية لتحليل ودراسة القرآن الكريم؛ وأن ذلك خطأ؛ بل ويعد أمرا بالغ الخطورة؛ لأن مآله الكلام في كلام الله سبحانه ودرسه بأدوات لسانية علمية لم تصنع لتحليل الوحي، وإنما وُضعت خصيصا لتحليل وسبر اللغات الإنسانية؛ وهذا ما دندن حوله وأكده وكرره (Ferdinand de Saussure) فردينون دي سوسير: واضع علم اللسانيات المعاصرة؛ والذي هو في الأصل لا يؤمن بشيء اسمه الوحي أو لغة وخطاب الوحي؛ فيجب التنبه لهذه الحيثية؛ فهي أصل البحث في هذا الموضوع؛ وكل الأدلة والتفاصيل التي سأحتج بها؛ إنما تستقى من هذ الأصل.
فيقال والحالة هذه: كيف لعلم تجريبي؛ أي اللسانيات؛ أن يدرس لغة وخطاب القرآن، وقد وضعه صاحبه، وتبعه في ذلك كل اللغويون الذين تبنوا منهجه الإبستمولوجي؛ وضعه لدراسة اللغات الإنسانية (ولِلُغات الغرب بالدرجة الأولى) بوسائل ونظريات وأدوات للتحليل لم تكتمل حتى الآن، ولم تقتُل البحث في هذا المجال بعد؛ بل ولن يُغلق باب البحث أبدا بسبب ظاهرة تطور اللغة البشرية (l’évolution linguistique)؛ (وهنا سؤال جوهري آخر: هل لغة القرآن تتطور وتتحول من طور لطور كما هي الحال مع لغات الإنسان؟ بالطبع لا !).
قلت: فكيف لهذا العلم لأن يدرس لغة القرآن وهو الذي يعرِّف اللغة بأنها « نظام من الإشارات المتجانسة (système de signes harmonieux/ » و »أنها منتوج اجتماعي produit social/ » (وهل لغة القرآن كذلك، حاشا لله !)، وأن تلك الإشارات « مكونة حتما من « دال ومدلول signifiant/signifié/) وأن العلاقة بين الدال والمدلول اعتباطية (relation arbitraire)؛ بمعنى لا يوجد، كما يقول سوسير : علاقة منطقية أو عقلانية بين الدال والمدلول (absence de lien logique ou rationnel entre le signifiant et le signifié)؛ وهل كلام الله سيحانه يقال عنه ذلك، عياذا بالله ! وهل يوصف الله بالعقلانية والمنطق؛ حاشا لله وأستغفر الله، بل ولقد بيَن علماء الإسلام أن ألفاظ القرآن؛ كل واحدة منها وفي كل آية من آياته؛ هي مقصودة لذاتها من الله عز وجل؛ في مبناها، ومعناها، وموضعها من الآية.
هذا، ثم لا يصح لنا أن نُغفل أمرا هاما؛ وهو أن دي سوسير إنما قال بظاهرة اعتباطية الإشارة اللغوية (l’arbitrarité du signe linguistique)؛ لأنه ربطها بكون اللغة عنده أنها انتاج اجتماعي ومجتمعي؛ (وهو بالمناسبة يرى أن اللغة تطورت من لا شيء، وأن البشر الأُوَل كانوا لا يتكلمون، وإنما كانوا في الطبيعة يهيمون ويصرخون !! وهذا مسطور في كتابه اليتيم والوحيد (درس اللسانيات العامة Cours de linguistique générale/)، فهو يقول هذا الكلام لأنه أولًا لا يؤمن بأن اللغة مصدرها الله عز وجل وأعطاها لأبينا آدم عليه السلام حيث كان في الجنة في السماء (وَعَلَّمَ آدَمَ الْأَسْمَاءَ كُلَّهَا ثُمَّ عَرَضَهُمْ عَلَى الْمَلَائِكَةِ فَقَالَ أَنبِئُونِي بِأَسْمَاءِ هَٰؤُلَاءِ إِن كُنتُمْ صَادِقِينَ)، (الرَّحْمَٰنُ (1) عَلَّمَ الْقُرْآنَ (2) خَلَقَ الْإِنسَانَ (3) عَلَّمَهُ الْبَيَانَ) ولأنه؛ ثانيا: تأثرا كثيرا بنظرية داروين التطورية والانتقائية؛ فطبَّقها إلى حد ما في لسانياته وطبقها مِن بعده مَن جاء بعده من اللسانيين.
وهذه التعريفات التي ذكرتها عن سوسير؛ هي بمثابة الأصول عنده؛ قعَّد لها وبثها في كتابه السالف الذكر؛ فمِن منطلق هذه الأصول التي بنى عليها اللسانيات المعاصرة؛ بداية من اللسانيات التركيبية والعامة، وتبعتها بعد ذلك علوم اللسان بداية من مطلع خمسينيات القرن الماضي، أراد؛ بل وجنح بعض اللغويين العرب وغيرهم من المتخصصين في اللسانيات الغربية لتسليط منهجها وأدواتها التحليلية ومصطلحاتها، بشقيها المذكورين في التوطئة، وتكريس ما وصلت إليه علوم اللسان من تقدم هائل لا ينكره أحد في دراسة وبحث لغات البشر وسبر أغوارها… جنحوا إلى تسليط تلك النظريات والأطروحات الخاصة بكلام البشر على كتاب رب البشر الذي هو كلامه الذي (لَّا يَأْتِيهِ الْبَاطِلُ مِن بَيْنِ يَدَيْهِ وَلَا مِنْ خَلْفِهِ ۖ تَنزِيلٌ مِّنْ حَكِيمٍ حَمِيدٍ)…
وإلى هنا سنقف في هذه الحلقة الثانية من بحثنا؛ الذي أرجو أن لا أطول فيه؛ وإنما سأبين أصولا مع ذكر بعض الفروع ليفهم المقصود من يهمه الأمر، وسأعطي أمثلة تجريبية إن شاء الله؛ أستدل بها على بيان خطورة هذا الموضوع؛ وأن إعمال اللسانيات لتحليل ودراسة كلام الله: القرآن العظيم؛ سيكون منتهاه الوقوع في التحريف لا سمح الله، وتحريف القرآن، كما بيَّنه علماء القرآن والشريعة، ينقسم إلى قسمين: تحريف لفظي وتحريف معنوي.
هذا والحمد لله رب العالمين والصلاة والسلام على رسوله الكريم.
ملحوظة: سأنشر النص مترجما/مكتوبا بالفرنسية حينما أفرغ منه بحول الله.
وكتب/ د. عبد الرحمن عياد
أستاذ محاضر في علوم اللسان
جيجل الخير، يوم الجمعة 13 رمضان المبارك 1446
الموافق ليوم: 14/03/2025 م.