Définitions de concepts-clés en linguistique et sciences du langage : 7 « contexte ».
Dr Abderrahmane AYAD
Maitre de conférences, HDR, en sciences du langage
Nota : Une version PDF est téléchargeable sur :
Remarque : Les astérisques (*) suivant certains concepts signifient que ces derniers sont définis dans le dictionnaire.
Contexte
Dans les études du sens des mots, le contexte en est un paramètre d’analyse capital. Perçu d’un point de vue relationnel, il se fonde sur la connexion que tiennent entre elle les unités lexicales immédiates. Ainsi partant du système notionnel ou sémique tissé par le système des unités lexicales, chaque mot ou unité exerce des influences formelles et sémantiques sur la chaine monémique* qui se trouve à gauche et à droite.
Ensemble des éléments linguistiques qui entou-rent un segment quelcon-que d’énoncé (mot, proposition, phrase) et conditionnent sa compréhension (…) Le contexte, l’environnement verbal, est l’ensemble des unités qui précèdent et qui suivent une unité déterminée. (C. Baylon, P. Fabre, La sémantique, avec des travaux pratiques d’application et leurs corrigés 1978 : 135 et 137).
D’un point de vue énonciatif, et dans l’analyse énonciative plus particulièrement, le contexte peut servir de paramètre de prélèvement des moments de déclenchement et d’arrêt des actes énoncifs.
Le contexte explicite, dans un texte, peut être exploité en vue de l’organisation intratextu-elle du discours, quand elle fait apparaitre des opérations de débrayage et d’embrayage tant énoncif qu’énonciatif. Ces opérations permettent de caractériser des types d’intra-textualité (comme la citation, la parabole, le commentaire…) qui spécifient des formes interprétatives dans le texte même et des effets véridictoires. (A.-J. Greimas et J. Courtés, Sémiotique. Dictionnaire raisonné de la théorie du langage, tome 2, 1986 : 54).
Habituellement, pour définir les différentes acceptions que porte une lexie donnée, le linguiste peut avoir recours, dans le contexte, à prendre en charge l’étude des occurrences du terme ainsi que les catégories (nom, verbe, adj.) qu’il occupe dans chaque occurrence en interrelation avec les autres unités de la séquence.
À côté du contexte, la linguistique peut recourir au critère formel que constitue la place de telle unité lexicale dans un tel ou tel énoncé. Elle peut recourir à la distribution, ensemble de toutes les positions qu’une unité linguistique peut occuper par rapport à toutes les classes d’autres unités ; par exemple, la distribution de beaucoup est différente de celle de très ; d’où l’idée que ‘’toutes différence sémantique ne se manifeste pas dans une différence syntaxique mais [que] à chaque différence syntaxique correspond une différence sémantique’’. Le verbe trainer a des sens différents selon qu’il a ou non un complément d’objet : trainer un fardeau / trainer en chemin. (C. Baylon, P. Fabre, La sémantique, avec des travaux pratiques d’application et leurs corrigés, 1978 : 136-137).
◊ Le rôle du contexte dans l’identification du sens, notamment en traduction
Le contexte, tout particulièrement dans le domaine de la traduction* islamique, est un élément fondamental pour la restitution du sens des unités lexicales au moment de l’acte traductif. Dans l’activité traduisante, la recherche du sens des mots ne s’arrête pas aux définitions* données par les dictionnaires. Il doit plutôt être exploré à travers l’emploi qui en est fait de ces derniers par l’auteur dans son TD, et dont le traducteur devrait en identifier le sens en contexte pour le reproduire en TA. L’on serait ainsi tenu de considérer l’environnement à traduire, en prenant en compte les mots qui sont en amont et ceux qui sont en aval, ce qui permettra l’extraction du sens dicté par le contexte ou l’environnement d’apparition du mot ou de l’expression en question.
Les mots ou les unités lexicales ne pouvant être réellement comprises en dehors des relations coexistant avec les autres unités lexicales dans l’environnement phrastique. » (A. Abderrahmane, La terminologie religieuse de l’islam dans la langue française. Étude descriptive et comparative des termes islamiques dans le cadre de la lexicologie et de la sémantique, 2017 : 31).
Autrement, chaque mot est appelé à être traduit dans le système des relations qui le lie à ses co-occurrents. Car, ce système, qui est celui des signes, ou des notions plus simplement, tellement sa nature structurelle, joue un rôle de cause à fait, de telle sorte que quand on a tel mot dans tel endroit de l’énoncé ou de la phrase, précédé et suivi de tels autres mots, son contenu sémantique sera chargé, contextuellement, de manière à indiquer un sens bien précis. « Le concept de contexte dans le discours se présente, en effet, comme une réalité incontournable pour décrire les réalisations linguistiques et les interpréter de manière fiable sans tomber dans l’ambiguïté. » (L. Kalal 2023).
◊ Le repérage en contexte du sens à reproduire
La recherche ou l’identification du sens* est une opération très complexe touchant non seulement au contenu sémantique* de l’unité à définir, mais autant à sa morphologie et son étymologie. Traditionnellement, le sens est défini en lexicologie comme étant l’ensemble ou la totalité des sémèmes que recouvre une lexie*. La lexie est elle-même le mot à traduire qui se trouve inséré en contexte. C’est le mot en discours, elle est actuelle, contrairement au lexème* qui lui est le mot existant en langue. Il est virtuel*.
Le sens d’une forme linguistique se définit par la totalité de ses emplois, par leur distribution et par les types de liaisons qui en résultent. » (E. Benveniste, Problèmes de linguistique générale I, 1966 : 290).
Abderrahmane AYAD, Dictionnaire de linguistique et des sciences du langage, Sciences et pratique, Béjaia, 2025, pp. 97-100.